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Jesse Eisenberg : L’angoisse et la légèreté

Rédaction Paris Match Belgique D'après un article Paris Match France|

Publié le 11 mars 2020 



Dans Vivarium, l’acteur américain de 36 ans incarne un homme piégé avec sa compagne dans un lotissement oppressant.

D’après un article Paris Match France de Karelle Fitoussi

Paris Match. Vivarium est un film d’horreur domestique sur l’absurdité du modèle familial que vous avez tourné juste après être devenu père. Le propos a résonné en vous ?
Jesse Eisenberg. Vivarium est un cauchemar surréaliste, presque freudien, sur la peur inconsciente du changement que nous avons tous : acheter une maison, se marier, avoir un enfant… Face à ces grands bouleversements, c’est l’idée de sa propre mortalité qu’on doit affronter. Ma femme est la première fille avec laquelle je suis sorti, donc je ne partage pas vraiment ces angoisses… Je combats l’idée de ma propre mortalité en écrivant des fictions, pour que quelque chose me survive. C’est sans doute très narcissique, mais c’est comme ça que je gère mes peurs. Ma femme, elle, aime sortir, profiter de la vie. Moi, je suis plutôt dans le déni de notre fin inévitable ! [Il rit.]

Le film oppose justement deux visions selon le genre : elle materne tandis qu’il est en quête d’autre chose… C’est votre vision du couple ?
Même lorsqu’on ne souscrit pas à cette vision normative de la famille, on finit souvent par l’embrasser malgré nous. Car on répète les schémas un peu classiques de ses parents ou c’est la société qui nous y oblige. Quand j’ai rencontré ma femme, à 18 ans, j’étais un petit banlieusard un peu con du New Jersey et elle venait d’une famille d’intellectuels marxistes et féministes très militants. Forcément, au début, tout ce que je pouvais dire l’offensait.

On vous a découvert en France dans le film indépendant Les Berkman se séparent, de Noah Baumbach, le réalisateur de “Marriage Story”. Vous saviez déjà que c’était le cinéma que vous vouliez défendre ?
Oh non ! Quand j’étais ado, je rêvais de jouer dans les comédies d’Adam Sandler, c’est ce que je regardais et ce pour quoi j’auditionnais. La chance que j’ai eue est de n’avoir jamais été choisi. Avec le recul, je me dis ‘Dieu merci j’ai fait des films sophistiqués !’ parce que j’avais tellement mauvais goût à l’époque…

Vous étiez pourtant déjà fan de Woody Allen à 15 ans…
Seulement parce que je me reconnaissais en lui. Tous les autres héros étaient grands et forts. Je l’ai aimé parce qu’il m’a fait penser à moi. Mais jamais je n’aurais imaginé me retrouver un jour devant sa caméra. J’ai d’ailleurs écrit à 16 ans un scénario autour de sa vie qu’un ami, pensant bien faire, a envoyé à son avocat. Ils ont répondu en me menaçant de me poursuivre pour diffamation ! [Il rit.]

Timothée Chalamet et Greta Gerwig ont été obligés de se justifier publiquement d’avoir tourné avec lui. Que pensez-vous du jugement moral qui s’invite désormais dans la critique ?
Mon approche a toujours été d’utiliser mon nom et ma célébrité pour faire avancer les choses de façon constructive. Je préfère verser des fonds plutôt que de me déverser dans la presse ou sur Twitter… que d’ailleurs je n’ai pas. Mais, évidemment, j’aspire à vivre dans un monde plus éthique, et je suis heureux que l’on demande de rendre des comptes à ceux qui ont commis des crimes. J’ai travaillé plusieurs fois avec Harvey Weinstein dans le passé, c’est une vraie brute, un bourreau…

Vous en aviez déjà conscience à l’époque ?
J’ai eu des problèmes avec les deux frères Weinstein, qui m’ont menacé de représailles si je ne faisais pas Cursed, de Wes Craven. J’avais 21 ans, j’ai demandé à mon père : ‘Tu crois que je suis en danger ? Tu crois que je devrais déménager ? Un producteur vient de me menacer en disant : Je sais où tu habites !’ Qui fait ça, sérieusement ? C’est juste dingue.

C’est à David Fincher et à son Social Network que vous devez votre succès ?
En vérité, ma chance a été de faire mes débuts à 18 ans dans Oncle Roger, un film indépendant qui aurait dû rester confidentiel mais a bénéficié du succès des distributeurs, qui venaient de sortir Le projet Blair Witch. Et l’acteur principal a remporté un trophée prestigieux, ce qui a amené encore plus de spectateurs. Ça a été comme de gagner au Loto. Quand je vois tous ces jeunes acteurs talentueux coincés dans une série débile pendant dix ans ou qui jouent dans une super pièce de théâtre que personne ne va voir… Je leur dis : ‘Bonne chance !’ Parce qu’il en faut beaucoup pour y arriver.

Aujourd’hui, vous êtes dans trois grosses franchises grand public. Ça fait partie du jeu ?
Je ne l’envisage pas comme un jeu. J’ai joué dans des films d’auteur nuls et dans de très bons blockbusters, il n’y a pas de règle. J’ai adoré interpréter Lex Luthor [Batman vs Superman, Justice League]. Tout autant que d’être dans Bienvenue à Zombieland et sa suite, parce qu’ils sont à mourir de rire. À mes débuts, j’avais dit à mon père : ‘Je veux devenir écrivain ! Acteur, c’est débile !’ et il m’avait répondu : ‘Tu penses donc qu’Al Pacino a moins de valeur qu’un mauvais auteur ?’

Où en est votre premier film ?
Il est prévu cet automne et s’appellera Pendant que tu finis de sauver le monde…, l’histoire d’une mère et de son fils de 15 ans. Elle, très occupée à gérer un foyer de victimes de violence, lui pur produit du capitalisme. Tous les deux sont très similaires, mais énervés par les idées politiques de l’autre… Je vais d’abord écrire et réaliser un épisode de la série Modern Love, pour Amazon, dans lequel je jouerai.

Vous venez d’interpréter le mime Marceau dans un film qui doit sortir cette année. Pourquoi cette histoire vous tenait-elle tant à cœur ?
D’abord parce que ma mère est clown et se peint le visage, comme le faisait Marcel Marceau. Mais aussi parce que la moitié de ma famille a été décimée pendant la Seconde Guerre mondiale, à l’endroit même où est née la sienne, dans le sud de la Pologne… C’est une histoire incroyable et importante pour moi.

J’ai lu que vous étiez devenu acteur pour pallier vos crises d’anxiété. Ça va mieux ?
Dans la mesure où je prends 15 cachets par jour, oui ! [Il rit].


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